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Contrats obsèques : quand l’encadrement devient vital

Face à la flambée des abus et au manque de transparence, les associations de consommateurs réclament un encadrement légal strict des contrats obsèques, devenus un marché juteux pour les assureurs.
 

Chaque année, près de 1,8 milliard d’euros de cotisations affluent vers les contrats d’assurance obsèques. Un produit censé soulager les familles au moment du décès, mais qui se transforme souvent en gouffre financier pour les souscripteurs. À l’approche de la Toussaint, l’Union nationale des associations familiales (Unaf) et l’UFC-Que Choisir tirent la sonnette d’alarme : « Trop de consommateurs versent des montants bien supérieurs au capital garanti, faute d’informations claires et de plafonnement des cotisations », dénoncent-elles.
 

Un pactole pour les assureurs, un piège pour les familles
Aujourd’hui, près d’un tiers des décès (32 %) est couvert par un contrat obsèques. Ces formules, souvent présentées comme une manière « d’épargner pour ses funérailles », sont en réalité des produits d’assurance, non d’épargne. Et les marges des assureurs y atteignent des sommets : selon les associations, seuls 40 % des montants collectés sont effectivement reversés aux familles endeuillées.
 

Le problème majeur réside dans les cotisations viagères, payées à vie sans plafond. Résultat : certains assurés ont versé le double du capital garanti, sans possibilité de rachat à un coût raisonnable. « L’absence d’encadrement légal conduit à des situations absurdes : des retraités continuent de cotiser bien au-delà de ce qu’ils percevront », déplore l’Unaf.
 

La valeur de rachat de ces contrats reste souvent dérisoire, et la procédure pour activer le capital au moment du décès s’avère si complexe que de nombreuses familles doivent avancer les frais funéraires avant d’être remboursées.
 

Un devoir de conseil en berne
Les associations dénoncent aussi un grave manquement au devoir d’information et de conseil. Documents illisibles, clauses ambiguës, délais de carence mal expliqués : la transparence promise par les assureurs n’est souvent qu’un mirage. L’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR) a d’ailleurs déjà sanctionné plusieurs établissements pour ces manquements lors de contrôles récents.
 

La confusion est d’autant plus grande que de nombreuses alternatives existent : la possibilité de faire régler directement la facture par la banque du défunt, dans la limite de 5 910 €, sans avance de frais ; ou encore le recours à des prestations sociales (capital décès des fonctionnaires, prévoyance d’entreprise, aides de la Sécurité sociale). Mais ces options sont rarement présentées par les distributeurs, qui privilégient la vente de prestations ou de contrats clés en main.
 

Des avancées, mais un encadrement encore absent
Sous la pression des associations, le Comité consultatif du secteur financier (CCSF) a adopté en 2024 plusieurs mesures de transparence : tableaux comparatifs du coût total selon l’âge, visibilité accrue des valeurs de rachat, réduction du délai de carence à douze mois. Des progrès salués, mais jugés insuffisants. Car le cœur du problème demeure : la rentabilité excessive de ces produits et l’absence totale de plafonnement des cotisations. « Aucune disposition du Code des assurances ou du Code civil ne protège aujourd’hui les consommateurs contre la surcotisation », rappellent l’Unaf et l’UFC-Que Choisir, qui appellent le législateur à agir.
 

Ce que réclament les associations
Les deux organismes formulent plusieurs propositions :
• Plafonner le cumul des cotisations viagères à deux fois le capital garanti ;
• Obliger l’Agira (Association pour la gestion des informations sur le risque en assurance) à informer sous 24 à 48 heures les opérateurs funéraires ou les proches désignés ;
• Recenser les contrats en déshérence, non réglés en raison de bénéficiaires introuvables ;
• Associer l’Agira aux registres d’état civil, pour être informée des décès dès leur déclaration en mairie ;
• Mettre à disposition dans les communes des supports d’information standardisés sur les prestations obligatoires, les options et les moyens alternatifs de financement.
 

L’objectif : en finir avec un marché opaque où la mort rapporte plus qu’elle ne soulage. Pour l’Unaf, « il est urgent que le contrat obsèques redevienne un outil de sérénité, et non une rente pour les assureurs ».
 


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